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Think local, act local : une stratégie de (re)conquête de marché

15/08/2012
C'est la devise de Coca-Cola. Chaque pays est libre d'agir à sa guise dans le développement de nouveaux produits et leur soutien marketing. En Belgique, cela donne trois nouvelles boissons, une campagne d'image, une action de GSM marketing et un nouveau site web

C'est la nouvelle devise de Coca-Cola. Désormais chaque pays est libre d'agir à sa guise dans le développement de nouveaux produits et leur soutien marketing. En Belgique, cela donne trois nouvelles boissons, une campagne d'image, une action de GSM marketing et un nouveau site web.

Crise des canettes, ralentissement des ventes, chute du cours de bourse, plan de restructuration: 1999 et 2000 ont été des « annus horribilis » pour Coca-Cola. Au point que l'an dernier, le big boss Douglas Ivester - qui avait géré de façon pour le moins malencontreuse la crise belge de juin 1999 -, fut prié de prendre la porte, non sans toucher de (très) confortables indemnités de départ.

Son successeur, Douglas Daft a remis dans l'ordre dans la firme d'Atlanta et réorienté complètement la stratégie, baptisée désormais « Think local, act local ». Objectif: rapprocher la world company de ses consommateurs, en leur proposant davantage de produits qui correspondent à leurs attentes. A cette fin, l'organigramme du groupe a été aplati avec trois entités géographiques (Amériques, Europe-Afrique et Asie-Océanie) et une entité baptisée « new business », chargé d'étudier le potentiel de nouveaux marchés. Finis donc les produits inondant la terre entière sans distinction aucune entre les pays, place à un marketing plus local.

Depuis le début de l'année, la Belgique applique cette nouvelle stratégie à la lettre: « Elle nous a permis de lancer en quelques mois trois innovations majeures », explique Dirk Veryser, directeur général de Coca-Cola Belgique Luxembourg. A cette fin, de nouveaux moyens ont été octroyés au marketing, plus particulièrement dans le domaine des études de marché: « Quelque 80 millions ont été investis en recherches sur le consommateur et sur ses besoins », souligne Philippe Dedryvere, directeur du marketing qui précise que c'est tout le processus de recherche qui a été inversé: «Auparavant, nous nous focalisions sur le passé, c'est à dire sur l'étude de notre performance, à présent nos moyens sont affectés au futur: l'étude du consommateur et des nouveaux produits correspondant à ses attentes ».

Nouveaux produits...

Premier de ces trois nouveaux produits: le Fanta Pomelo, un agrume amer et pauvre en calories qui cible les 20 ans et plus, amateurs de saveurs fruitées sophistiquées et faibles en calories. Bref, un produit répondant aux nouvelles tendances chez les jeunes adultes qui souhaitent des produits moins agressifs et plus originaux que les soft drinks traditionnels. Pour soutenir ce lancement McCann Erickson Belgium a adapté à la sauce belge un hilarant spot (le fameux « Hello » lancé sous forme de rot tonitruant) pour Fanta Orange, conçu par l'agence israélienne Geller Nessis D'Arcy. Diffusé en télévision et au cinéma, il semble avoir fait mouche auprès des consommateurs puisque, aux dires de Coca-Cola, les objectifs de vente ont été doublés avec 200.000 consommations par jour.

Deuxième nouveauté: Frutonic, un dérivé des jus de fruits Minut Maid. Ni vraiment eau, ni vraiment jus de fruit, cette boisson légèrement pétillante et riche en vitamines vise les 25 ans et plus, en particulier les femmes qu'effraie la teneur élevée en calories des soft drinks. La boisson s'inscrit donc nettement dans la tendance santé et bien-être. Lancée début juin, elle est notamment soutenue par un spot télé et des annonces en presse féminine, le tout étant signé Lowe Lintas.

Troisième innovation, enfin, qui vise le même public que Frutonic: Aquana, une boisson sportive, dérivée d'Aquarius (un marché que la marque domine avec 60% des ventes), mais positionnée sur le marché des eaux afin de rassurer la cible féminine. Riche en vitamines et en sels minéraux, Aquana a été entièrement conçue en Belgique: du concept au plan marketing, en passant par la pub et la production qui est faite à Gand. Le nom a été trouvé par le bureau de recherche en noms de marque Remarkable, le look clé la bouteille avec bouchon est signé Desgrippes Gobé Brussels et la campagne de pub, tournée à Miami, est l’œuvre de McCann Erickson Belgium. Des annonces dans la presse féminine et sportive sont également au programme, de même que du matériel POS, le sponsoring de manifestations sportives et la distribution d’échantillons dans les clubs sportifs. Même les médecins ont été approchés, sous forme de dépliants distribués dans quelques 3000 cabinets.

Nouveaux marchés...

Coke ne compte pas en rester là. Dans ses cartons figurent des boissons à base de plante et de lait, des boissons nutritionnelles, des thés, bref autant de marchés qui sont étrangers à son «core business». C'est que, bien qu'elle représente 75% des ventes de la société (23 milliards en Belgique en 2000), la marque Coca-Cola est stationnaire (sauf le «light», en hausse de 10% ). La croissance est donc plus forte sur ces marchés annexes car ils permettent notamment de toucher de nouvelles cibles. Dans ce but, Coca-Cola a conclu une série de partenariats internationaux avec d'autres géants: Nestlé, pour développer des boissons prêtes à boire à base de plante et d'herbes (thé, tisanes...), Procter & Gamble, pour créer de nouvelles boissons nutritives (vitamines, calcium...) et Disney, pour lancer des boissons à base de fruits, de jus vitaminés et de lait: celles-ci seront produites par Coca-Cola et vendues sous la marque Disney.

Nouvelle approche multimédia

Si ces chantiers devraient permettre à Coca-Cola de toucher de nouveaux consommateurs, les jeunes demeurent bien évidemment le cÅ“ur de cible Coca-Cola. Depuis le début de l'année, Coke a d' ailleurs multiplié les offensives de charme à leur égard, toujours avec cette approche locale qui est désormais son cri de guerre. C'est ainsi qu'en mars était lancée l'opération «Message in a Coca-Cola», première campagne de «GSM marketing» d'envergure. Destiné à doper ses ventes dans l'Horeca, l'opération consistait à permettre aux détenteurs de GSM (70% ont entre 15 et 29 ans) d'envoyer des canulars à leurs connaissances. Résultat : 1,5 millions de messages envoyés et une formule en passe d'être reprise à l'étranger, vu son succès.

Peu après, Coca-Cola a entièrement revu son site web belge (www.coca-cola.be) au travers d'une approche plus ludique et interactive. Signé Kadratura pour le développement du copywriting et Ex Machina pour le développement du site, le site entend renforcer le lien entre les jeunes et la marque à travers de concours, cadeaux, infos gadgets, promos, etc.

… Et nouvelle pub

Enfin toute cette approche résolument locale est emballée par une grande campagne de pub lancée au printemps sous le slogan «Life tastes good». Objectif: montrer que « Coca-Cola est associé aux moments précieux de la vie de tous les jours en les transformant en moments d'exception». Fort bien, mais pourquoi avoir repris pour le marché belge un spot conçu par McCann Erickson New York mettant en scène un groupe de jeunes dans ce qui semble être une rame de métro américaine? « Il n'est pas toujours nécessaire de montrer Manneken Pis ou la Gare du Midi dans les campagnes belges», ironise Philippe Dedryvere, «les sentiments que partagent ce jeunes dans le spot sont universels». Sans doute, mais cela s'apparente à un coup de canif à la nouvelle stratégie. En fait, seuls les gros marchés semblent bénéficier d'une autonomie totale. En France, par exemple, le spot a été tourné pour le compte de Publicis par Eric Zonca, réalisateur français auteur notamment du superbe «La vie rêvée des anges». Le spot n'aurait-il pas pu convenir pour la Belgique francophone? «Trop français», répond Philippe Dedryvere. Soit. Coca-Cola est donc allé fouiller dans une banque d'une trentaine de spots produits par l'international pour en retirer celui qui est diffusé aujourd'hui après avoir été adapté par McCann Erickson Belgium qui redevient donc «lead agency» de la marque comme c'était le cas avant que le budget ne passe chez Publicis.

Les volets affichage et radio sont en revanche 100% belges. Six spots radio différents ont été produits et adaptés - fait encore trop rare en Belgique - aux émissions durant lesquelles ils sont diffusés (rock, latino, dance ...), tandis que les affiches grand format font clairement allusion à la «culture» jeune des Belges comme ce panneau montrant des jeunes dans la boue d'un festival rock, genre Werchter.

Après avoir réduit ses investissements de 40% en 2000 par rapport à 1999 (ce qui le fit reculer de Sème à la 20ème place dans le top des annonceurs), Coca-Cola est donc de retour sur la scène publicitaire. Les 550 millions investis l'an dernier en médias devraient augmenter à la faveur des nouveautés lancées depuis le début de l'année. De quoi permettre à Coke d'atteindre ses objectifs de vente pour 2001; soit une croissance en volume de l'ordre de 5 à 6% et une progression du chiffre d'affaires de 7 à 8%.

Analyse : Jean-François Sacré, PUB, septembre 2001.

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